Profession de foi de François Thonier
par
François Thonier, militant pour la gratuité des transports publics.
François Thonier, militant associatif, RMIste, voyage sans débourser un centime depuis décembre 1997.
À cette date, sa voiture fut emportée à la fourrière à la suite d’une banale panne de carburant : François Thonier n’avait pas les moyens de payer un plein. La voiture fut détruite quinze jours plus tard, François n’ayant pas eu les moyens de la sortir de la fourrière.
Depuis, avec AC !, François Thonier milite pour la gratuité des transports publics, d’abord pour les chômeurs et précaires pour revendiquer la liberté de circulation, ensuite pour la population entière pour revendiquer le droit de vivre dans un environnement non pollué.
Depuis aoà »t 2002, François Thonier voyage gratuitement de manière légale dans les 8 départements de la région Midi-Pyrénées où le conseil régional a adopté une politique sociale envers les précaires.
Au-delà des « frontières  » régionales, il est considéré comme délinquant.
Le 31 octobre 2001, le Parlement a voté la « loi de sécurité quotidienne  » qui criminalise les personnes qui, comme François, empruntent les transports en commun sans ticket : elles sont passibles de 6 mois de prison et 7500 euros d’amende.
À ce titre, François Thonier fut condamné à 2 mois de prison ferme, 800 euros d’amende et 769,40 de dommages à la SNCF par la Cour d’Appel de Bordeaux le 4 novembre 2004, puis à 15 jours avec sursis assortis de 2 ans de mise à l’épreuve, 150 euros d’amende et 769 euros de dommage à la SNCF par le tribunal de la Rochelle.
François a fait appel de cette dernière condamnation. Il est convoqué devant la Cour de Poitiers le 3 février à 14 h.
Voici l’explication qu’il entend donner aux juges :
« Je suis condamné alors que je n’ai causé aucun tort à personne pas plus qu’à la société. Bien au contraire, je m’efforce de remplir au mieux mes responsabilités de citoyen et de père de famille (et de grand père). Je tiens aussi à défendre toutes les personnes qui, comme moi, sont victimes d’une répression pour le seul motif qu’elles ont un revenu insuffisant pour financer leurs déplacements.
En prenant le train sans billet et en occupant une place disponible (la plupart du temps, les trains Corail n’ont un taux d’occupation que de 20 à 60 %), je ne pénalise personne, je ne cause aucun surcoà »t à la SNCF. Je voyage sans causer aucun coà »t supplémentaire, ni en énergie, ni en pollution, ce qui n’est pas le cas de ceux qui se déplacent en automobile, même s’ils pratiquent le co-voiturage.
Je ne fraude pas car je ne cherche pas à tromper. Souvent, je vais voir les contrôleurs dès le départ du train, ce qui peut être l’occasion de discussions intéressantes :parfois je rencontre des contrôleurs soucieux d’écologie qui, très vite, reconnaissent les bienfaits d’une gratuité accordée par étapes à l’ensemble de la population, d’autres fois, il faut jusqu’à deux heures de discussion pour arriver à en convaincre un. Dans la majorité des cas, l’accord se fait sur la gratuité pour les faibles revenus.
La Déclaration Universelle des Droits de l’Homme tout comme le Préambule de la Constitution de notre République garantissent en principe un revenu décent à tous les citoyens. Or, comme plusieurs millions de personnes en France, je ne dispose que d’un revenu inférieur au seuil de pauvreté et ceci depuis dix ans.
Il est intéressant de constater que ces textes ont été écrits et votés à une époque où la pénurie régnait en Europe, alors qu’aujourd’hui, nous sommes dans une période d’abondance (mais aussi de gaspillage effréné et absurde).
Dans ces textes, la garantie de revenu s’applique même aux personnes qui, pour diverses raisons, ne peuvent pas travailler.
Pour ma part, je remplis pleinement mon « devoir de travailler  » au sens d’activités économiquement et socialement utiles : aide à des agriculteurs bio, participation à du jardinage associatif, aide à la construction de maisons écologiques, articles pour des revues associatives, activités de formation à l’écologie et à l’économie, aides diverses dans les réseaux SEL.
La majorité de ces activités, je les exerce à titre bénévole, les autres dans le cadre d’échanges sans argent :repas, gîte, unités SEL.
Je considère que je paie ma place en exerçant des activités d’utilité sociale et en vivant de façon écologique et solidaire.
Je viens d’achever une formation de formateur qui m’a coà »té 50 euros par mois pendant 4 ans. J’ai financé moi-même plusieurs stages (en particulier en permaculture et agriculture bio) car je compte continuer à exercer une pleine activité utile bien au-delà de 65 ans. À 62 ans, je suis en excellente santé grâce à une grande hygiène de vie.
Ce type d’existence est pour moi un choix éthique : agir là où je sais que je serai le plus utile autant à la société où je vis qu’à l’ensemble de l’humanité. Je ne postule que pour des emplois dont l’utilité sociale me paraît incontestable. Je considère donc que j’apporte à la société une contribution qui vaut bien ma part du revenu national (théoriquement environ deux fois le SMIC).
En voyageant gratuitement de la façon la plus écologique et la plus économique, je ne fais que reprendre -sans léser qui que ce soit- une toute petite partie de revenu dont je suis spolié : je ne suis en rien un fraudeur mais quelqu’un qui a payé ses déplacements avec une valeur réelle et non avec une monnaie (l’euro) dont je conteste la légitimité autant que l’utilité économique (car créée par des capitalistes privés sous forme de dette avec intérêts pour le profit financier de quelques-uns plutôt que par des pouvoirs politiques démocratiques pour permettre la production, la diffusion et la répartition des biens économiques réels).
D’autre part, mes voyages en train entre Nantes et les Pyrénées me sont nécessaires pour remplir à la fois mes devoirs de père et de citoyen responsable soucieux de l’avenir de l’humanité, les deux étant liés puisque mes projets d’éco-village sont au service des générations futures.
Un aller-retour mensuel me coà »terait 150 euros à prélever sur mes 367 euros de RMI. Or, c’est la somme que je donne comme participation à l’entretien de ma fille (16 ans) car sa mère, aide-soignante à 3/4 temps, a du mal à boucler son budget.
Par ailleurs, rien que pour mon loyer, je dois ajouter 128 euros à mon allocation logement. Je ne pourrais pas vivre si je ne me procurais pas une grande partie de ma subsistance par échanges.
C’est bien un état de nécessité, une nécessité bien plus impérieuse qu’une nécessité matérielle, une nécessité morale qui fait que je voyage sans argent.
Pour moi, il est hors de question que je vive en désaccord avec ma conscience. Cela me semble une nécessité évidente alors que l’humanité n’a jamais été aussi en danger qu’actuellement.
La destruction de la couche d’ozone et l’augmentation de l’effet de serre par gaspillage des combustibles fossiles dérèglent le climat et menacent de plus en plus la vie humaine.
Au niveau des villes, la pollution sonore comme celle de l’air, jointes au stress des encombrements, nuisent de plus en plus gravement à leurs populations.
L’entière gratuité et le développement des transports publics urbains peuvent améliorer considérablement leur vie.
Le ferroutage combiné au principe « produire et consommer localement  » peuvent obtenir des effets comparables au niveau du transport des marchandises.
Cela implique l’établissement d’une véritable économie orientée vers le bien-être des personnes et non plus vers les profits financiers.
J’agis en solidarité avec tous ceux qui voyagent sans billet pour des raisons de faibles revenus voire de totale absence de revenus : je pense en particulier aux jeunes.
Cette année, j’ai fait pendant 5 mois de l’accueil social auprès des plus dévaforisé-e-s. J’ai pu voir l’aggravation des conditions de vie d’un nombre croissant de jeunes et la légitime montée de leur colère.
Une étude sociologique récente (parue en 2004) a montré que la mobilité était un facteur essentiel d’insertion sociale.
La gratuité des transports publics pour les chômeurs et précaires ne serait certainement pas plus coà »teuse que de les laisser voyager dans des véhicules mal entretenus avec tous les risques de pollution et d’accident qui en découlent.
Pour les personnes à faibles revenus, le délit de « fraude habituelle  » n’est qu’une injustice supplémentaire qui aggrave leur situation.
« Jusqu’à quand nous traitera-t-on d’assistés ? Quels sont les vrais assistés ?  ».
Pour joindre François Thonier.
Pour joindre le comité de soutien.
Envoyez vos signatures (avec vos noms et adresses) :
à AC ! Nantes (comité de soutien à François Thonier) 21 allée Baco, 44000 Nantes.
ou par mail.
ou signez l’appel en ligne sur le site d’AC !.
Les procès coà »tent cher. Envoyez vos chèques à Comité de soutien à François Thonier, AC ! Nantes, 21 allée Baco, 44000 Nantes ; Chèques à libeller à l’ordre d’AC ! Nantes, mention au dos : « Comité de soutien  ».
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