Assurance-chômage
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Dans un supplément à son magazine « Syndicalisme hebdo  », le syndicat CFDT accuse de « démagogie  » ses détracteurs, dans la gestion de l’assurance-chômage. Nous estimons qu’au contraire, en reprenant les arguments fallacieux d’un « sauvetage du système  » et de « l’incitation au retour à l’emploi  » pour légitimer la dégradation de l’Assurance chômage et priver de ressources des centaines de milliers de personnes, c’est la CFDT qui fait preuve d’une démagogie éhontée.
« Sauver le système  »
Le déficit de l’UNÉDIC a été creusé par les promoteurs du PARE eux-mêmes (dont la CFDT), en baissant les cotisations à un moment où le régime était excédentaire. Au moment de la signature du PARE et ensuite à plusieurs reprises, nous avions attiré l’attention sur ce déficit prévisible.
« Le PARE a augmenté le nombre des chômeurs indemnisés...  »
L’augmentation du nombre de chômeurs indemnisés doit moins au PARE qu’ à une reprise relative qui a permis à un certain nombre de salariés d’ouvrir des droits à l’indemnisation. L’augmentation du chômage à également sa part dans l’augmentation du nombre de chômeurs indemnisés. En outre l’augmentation des radiations qui concerne principalement les chômeurs non-indemnisés fait mécaniquement augmenter la proportion des chômeurs indemnisés.
« Non-dégressivité maintenue...  »
Devant les menaces du MÉDEF, la CFDT recule. Le retour à la dégressivité des indemnités avait été agité par le MÉDEF comme un épouvantail pour mieux faire passer une nouvelle dégradation des droits. La CFDT est tombée dans le piège ou n’a pas eu le courage de s’opposer. Le calcul reste à faire : un retour à la dégressivité des indemnités aurait-il été vraiment pire pour les demandeurs d’emploi que la réduction du temps d’indemnisation ? Quoi qu’il en soit, rien ne garantit devant l’énorme déficit annoncé, que la CFDT n’accepte pas la degressivité comme elle l’avait fait en 94.
« Les indemnités ont été maintenues en 2003  »
La belle affaire ! Nous attendons de la CFDT qu’elle aille « rassurer  » elle même les demandeurs d’emploi dans les ANPE ; au regard des témoignages et des appels que nous recevons des chômeurs, le syndicat devra pour le moins faire preuve de pédagogie. Rappelons qu’ à la fin du seul mois de janvier, 165 000 au moins personnes se retrouveront sans ressources. Quant au reste des plus de 250 000 personnes concernées dès janvier, ils n’auront de ressources que les minima sociaux (ASS, RMI...). Mais la CFDT, qui répugne à la « démagogie  » ira-t-elle parler à des chômeurs ?
« Sans proposition...  »
Depuis vingt ans, les associations de chômeurs se battent pour une remise à plat des différents systèmes d’indemnisation et ont des propositions en la matière, avec entre autres :
Une démocratisation de la gestion de l’assurance chômage en reconnaissant les associations de chômeurs qui participeraient aux décisions,
Une unification du régime d’indemnisation de manière à indemniser TOUS les chômeurs et plus seulement 50 %.
Une augmentation généralisée des cotisations et plus particulièrement conséquente pour les entreprises qui ont recours aux contrats précaires (intérim, CDD et temps partiel imposé). La précarité, en effet, contribue à creuser le déficit de l’UNÉDIC en renvoyant les salariés au chômage après avoir ouvert des droits. Ainsi nous suggérons d’appliquer à l’assurance-chômage le principe du « pollueur payeur  ».
« Alimenter les extrêmes  »
Nous y voilà . Preuve de la cécité sociale totale dont fait preuve la CFDT, l’argument est le même que celui dont usent les partis politiques face à la contestation pour faire passer une politique libérale dévastatrice de la société. La contestation de mesures injustes aux conséquences sociales désastreuses est assimilée à de la démagogie et on l’oppose au « réalisme économique  ».
C’est précisément cet argument du « réalisme économique  » comme justifiant ces mesures qui ajoute à cette colère que les observateurs sociaux nomment, pudiquement et faute de mieux, le « ressentiment  ». Et c’est ce « ressentiment  », auquel font place la souffrance et l’humiliation, qui alimente « les extrêmes  » (encore faudrait-il que la CFDT précise lesquels pour que nous puissions lui répondre plus rigoureusement).
« Nuire à la CFDT...  »
On peut comprendre que, confronté à une contestation interne grandissante, le syndicat verse dans la paranoïa. C’est d’ailleurs sans doute en partie à cause de cette contestation que la direction de la CFDT s’est fendue d’un argumentaire sur l’assurance chômage.
La direction de la CFDT ne connaît ni ne comprend rien aux problèmes quotidiens auxquels les chômeurs et les précaires sont confrontés (c’est d’autant plus un problème que parmi les salariés qu’elle entend défendre, certains risquent d’être confrontés à ces difficultés dans un avenir plus ou moins proche). La question de la souffrance sociale est difficile à porter. Les organisations de chômeurs sont confrontées à un « indicible social  » : la souffrance et l’injustice sociale n’ont de place au moment de leur expression que dans des catégories préconstruites et entretenues : « charité  », « compassion  » ou bien « misérabilisme  », « démagogie  », « ressentiment  »... La CFDT, comme bien d’autres, n’échappe pas à ce formatage. Pour porter la question de l’injustice et de la souffrance sociale, les organisations de chômeurs ont d’autres catégories : lutte, solidarité...
La direction de la CFDT ne semble ne pas comprendre non plus que la dégradation de l’indemnisation chômage à des conséquences déterminantes sur les conditions de travail et sur les salaires. En participant à cette dégradation, la CFDT retire aux salariés autant de garanties collectives de protection contre le chômage et nous semble, sans vouloir « donner des leçons  », faillir à sa vocation syndicale.
Finalement, ce que la CFDT reproche à ses détracteurs, c’est de faire ce qu’elle ne fait pas : défendre les salariés, privés d’emplois ou non. Si la démagogie consiste à se préoccuper davantage des conditions de vie des gens et de la défense de leurs droits que de la place que l’on occupe auprès du MÉDEF ou d’une orthodoxie économique supposée, alors nous sommes démagogues.
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